NOTRE
INTERVIEW DE SOPHIE
NOVEMBRE 2002
KEBEMER (Sénégal)
Tracto'Dak
: Sophie,
comment c'est passée ta rentrée des classes ? Sophie : Très bien cette
année encore, grâce aux bénéfices de la fête africaine qui m'ont permis
d'acheter pas mal de fournitures. Pour les classes d'initiations et CP chaque
enfant a reçu 1cahier de devoirs, 1 cahier de compositions, 1 ardoise, 1
stylo et 1 crayon. Le taille-crayons et la gomme leur sont prêtés et récupérés
chaque jour, pour ne pas être perdus et ainsi servir plusieurs années. Pour
les CE1 et CE2 : 2cahiers (leçons et exercices) 1 ardoise, 1 stylo, 1 crayon
et pour chaque groupe de travail : 1 règle, 1 équerre, 1 compas et 1 rapporteur,
ramassés chaque soir. Les CM ont la même chose plus 1 cahier de rédaction.
Cette année, j'ai pu acheter des livres de lecture. Ils sont loués aux familles
200 CFA (2 Francs) ; ils doivent me les rendre en fin d'année. Si je les
donne, ils seront perdus. Avec l'argent récolté, j'achète de la colle qui
servira pour les livres déchirés. Plusieurs fois dans l'année, j'organise
des ateliers de réparation de livres, avec mes maîtres et maîtresses. Nous
offrons les livres aux plus démunis et aux orphelins. J'ai également acheté
des ardoises ; 2 par enfants car elles sont en carton et ne durent pas toute
l'année.
Tracto'Dak : Quelle est l'évolution de l'école de Kébémer depuis quelques
années ?
Sophie : Avant, les enfants arrivaient les mains vides à l'école,
les familles devaient acheter les fournitures, (les enfants sans matériel
étaient renvoyés chez eux jusqu'à ce que leurs parents le leur achètent)
de ce fait la rentrée pouvait s'étaler sur plusieurs jours et nous commencions
à travailler réellement au bout de quelques semaines. Maintenant, grâce
à notre collaboration, dès le 1er jour, il y a distribution de fournitures
et ainsi aucun enfant n'est renvoyé chez lui. Nous même, équipe enseignante,
sommes plus motivés. Nous préparons notre rentrée une semaine avant les
enfants pour arranger l'école, la nettoyer et organiser nos classes. Les
parents sont contents, se sentent soutenus et du coup s'investissent pour
les plantations dans la cour de récréation et l'entretien. Notre école est
devenue " Classe verte " et " Ecole pilote " ; elle est visitée et sert
d'exemple.
Tracto'Dak : Tout ça est très encourageant ?
Sophie : Les conséquences de tous ces efforts sont les suivantes
: en 1995, nous avions 15% de réussite en CM2 et un taux d'abandon de 10
à 15% (surtout les filles dont les parents choisissaient de donner le matériel
aux garçons). Depuis qu'il y a plus de matériel, le taux d'abandon est passé
à 0 et il y a de plus en plus d'enfants inscrits. En 2001 le taux de réussite
était de 96%, avec félicitations du président de la république et du ministre
de l'éducation. Vraiment de quoi être fière.
Tracto'Dak : L'école de Kébémer est donc citée en exemple ?
Sophie : Oui, elle fait désormais partie des meilleures écoles du
Sénégal et sa popularité fait tâche d'huile avec les 5 autres écoles de
Kébémer qui copient en plantant arbres, fleurs etc… Quand je peux, je donne
des fournitures aux classes les plus démunies, mais ce n'est pas toujours
évident !
Tracto'Dak : A l'approche des fêtes de fin d'année, quelle ambiance à
l'école ?
Sophie : Malgré une grande majorité de musulmans à Kébémer, les enfants
connaissent le Père-Noël par les livres, mais ils n'ont pas de cadeaux et
les tous petits pensent que le Père-Noël est blanc et donc qu'il ne donne
des cadeaux qu'aux blancs… !!!
Tracto'Dak : Nous pourrions prévoir un cadeau commun pour tous (des ballons
de foot et cordes à sauter par exemple) et dire aux enfants que le Père-Noël
est passé et a apporté ces jeux pour l'école. Qu'en penses-tu ?
Sophie : Ce serait une belle idée et une bonne surprise au retour
des vacances de Noël. Le 22 décembre, et pour la 2ème année consécutive,
j'organise une distribution des prix. A cette occasion, les peluches, jeux,
livres et stylos que vous nous avez offerts seront remis aux enfants les
plus " méritants " (selon la quantité de lots). Ce qui veut dire qu'une
majorité d'enfants sera récompensée. Donc, pour eux, c'est déjà un peu Noël
! J'en profite pour remercier les enfants qui ont donné un jouet ou un livre,
ils peuvent être sûr qu'il fera le bonheur d'un copain africain. Merci également
à tous les parents et à la municipalité pour leur aide, ainsi qu'aux 3 institutrices
pour l'échange entre nos deux écoles qui compte beaucoup pour nous. Notre
devise " Aidez-nous à rester chez nous " est une évidence pour nous. Notre
but est que nos enfants restent au pays et pour cela il faut leur donner
toutes les chances et la possibilité d'étudier dans de bonnes conditions
afin de trouver un bon travail plus tard et ainsi ne pas avoir envie d'aller
chercher ailleurs. Pour notre avenir nous avons besoin d'eux !
Tracto'Dak : Merci Sophie et rendez-vous en septembre 2003 ?
Sophie : C'est sûr, je serai là l'an prochain pour la fête africaine.
Inch'allah !
La
conclusion de Sophie
Le
travail accompli est significatif, le chemin parcouru est important, les
réalisations déterminantes. Mais loin de baigner dans l'autosatisfaction,
l'ensemble des acteurs est conscient que l'amélioration des conditions de
travail, la transformation positive du milieu scolaire, la formation d'élèves
capables de réussir autre chose que lire et écrire seulement, ne saurait
être une destination, mais un voyage sans fin où il faut sans cesse refaire
le chemin pour rectifier la trajectoire. Le travail continue !
La conclusion de Tracto'Dak
Nous
sommes fiers de pouvoir apporter un peu d'eau à ce moulin. Notre devise
" l'aide directe et sans intermédiaire " prend ici tout son sens.
SOPHIE
DIEYE PERRET
Rencontre
avec une institutrice
hors
du commun
Nous
avons connu Sophie DIEYE, par l'intermédiaire d'une amie
" instit " qui correspondait avec elle. Lors d'un voyage de Christian en Afrique,
en 1998, elle lui demande d'emmener des fournitures scolaires pour l'école
de Kébémer au Sénégal, ce qu'il fît avec plaisir, et non sans promettre à
Sophie de revenir l'année suivante.
La
découverte d'une école différente
C'est
lors du Dinan Dakar, en 1999, qu'il retourna à Kébémer, pour livrer de nouveau,
des fournitures scolaires qu'il avait emmenées dans sa benne. Cette année
là, les enfants et moi avons rejoint Christian à Dakar pour passer les fêtes
de Noël ensemble ( et le cap de l'an 2000). Nous avons donc fait la connaissance
de Sophie. Elle nous fit visiter son village, et nous expliqua tout ce qu'elle
faisait pour son école.
Les 320 élèves à FATMA M'BAYE KEBE sont répartis dans 6 classes. L'école est
jolie, très bien arrangée, il y a de grandes fresques sur les murs des classes
et dans la cour 2 cases de lecture... et du sable !
Depuis 1 an, avec l'argent récolté des ventes d'objets artisanaux, Sophie
a pu faire installer 2 WC. Et puis, la bibliothèque dont elle est si fière,
il n'y a pas énormément de livres, mais c'est déjà très bien. Elle nous explique
qu'elle loue les livres aux enfants (très peu cher, quelques dizaines de centimes),
et l'argent lui permet d'acheter un peu de fournitures supplémentaires.
Quand Sophie a obtenu le poste de direction, les familles ne voulaient pas
laisser leurs enfants dans une école dirigée par une femme, aujourd'hui l'école
est pleine. Sophie a aussi donné la chance aux filles, en allant carrément
dans les familles éloignées ou l'on donne encore très souvent la priorité
aux garçons. Les enfants de là-bas n'ont vraiment pas grand chose, mais ils
ont toujours le sourire et la joie de vivre. Les nôtres ont regardé et écouté
attentivement tout ce que Sophie a expliqué, et ils ont bien compris les différences
avec leur école. En y réfléchissant, je ne sais lesquels ont le plus de chance
! ! !
Sophie nous a reçus pour le déjeuner, et nous avons découvert le " poulet
yassa ", excellent !
Nous avons ensuite regardé ensemble les cahiers et dessins que nous avaient
donnés les enfants de l'école de notre village Anjou.
La
venue de Sophie à Anjou
L'été
suivant, nous avons accueilli Sophie pour quelques jours. A cette occasion,
nous avons organisé une fête africaine, et les bénéfices de cette journée
ont été donnés pour son école. La fête a super bien marché, nous étions tous
ravis.
Nous lui avons fait visiter notre école, elle est venue dans chaque classe
rencontrer les enfants, qui sont tombés sous son charme, elle portait un magnifique
" boubou " noir et or. Elle leur a expliqué son école, ses élèves et leur
façon de vivre et de travailler, elle leur a même dit que les enfants sots
pouvaient recevoir des " fessées ", et ça… ils en sont restés bouche bée !
! !
Ils ont posé pleins de questions auxquelles Sophie répondait toujours avec
justesse et une gaieté communicative. L'après-midi s'est achevé avec un pot
de l'amitié, ici fort bien nommé.
Cela fait maintenant 7 ans que nous soutenons cette école en organisant nos " Journées africaines " en septembre, toujours avec le même enthousiasme et grâce à la collaboration d'amis de l'association qui viennent chaque année, spontanément nous aider à faire en sorte que cette journée soit une vraie fête.
Sophie
et Claudine devant l'école "M'Baye Fatma Kébé"
à Kébémer au Sénégal
Sophie
Le stand Tracto'Dak avec Sophie
Les toilettes refaites en 2005/2006 grâce à Tracto'Dak
2007
Nous avons participé à l'équipement en matériel
et en médicaments de la nouvelle case santé